Pages

samedi 31 décembre 2016

Le Consulat et le Premier Empire revisité

Jean-Philippe Rey, agrégé et docteur en histoire, enseigne en classes préparatoires à l'Institution des Chartreux et à l'Institut d'études politiques de Lyon. Il vient de publier une Histoire du Consulat et du Premier Empire chez Perrin. Article inédit.  
Thierry Lentz, directeur de la Fondation Napoléon et auteur d'une Nouvelle histoire du Premier Empire en quatre volumes et d'un Grand Consulat, préface l'ouvrage. Jean-Philippe Rey a découpé la période en quatre parties respectant un plan chronologique. Dans la première, intitulée "la dictature de Salut public (1799-1802), l'auteur traite du coup d'État de Brumaire, de l'établissement du régime, de la nécessité pour le Premier consul de gagner la guerre car le peuple français souhaitait la paix, de la "grande entreprise" de réformes et du triomphe du Premier consul qui obtint le viager de son pouvoir en 1802. La deuxième partie, "le choix de l'Empire (1802-1806)", l'auteur indique que, suite à la reprise de la guerre, l'Empire devait s'imposer comme solution nationale puis comme gouvernement avant d'étudier l'emprise du pouvoir sur la société et surtout le fait que l'Empire est une manière pour la France d'organiser sa domination sur l'Europe. Dans la troisième partie portant sur "le choix du système (1806-1810)", l'auteur montre comment Napoléon organise son contrôle sur l'Europe après avoir défait et humilié la Prusse et s'être entendu (provisoirement) avec le tsar de Russie, Alexandre. Mais Napoléon commit deux erreurs importantes : la première en s'aventurant dangereusement en Espagne et la seconde en s'aliénant les catholiques lorsqu'il fit le pape Pie VII son captif. La dernière partie, "l'échec du système (1811-1815)", présente la fin du système napoléonien  (la douloureuse campagne de Russie et l'éprouvante campagne d'Allemagne) et la chute du Premier Empire en France (la campagne de France et les Cents Jours). Pour son ouvrage, Jean-Philippe Rey a puisé dans l'historiographie la plus récente sans qu'il néglige les classiques de la période. 

Jean-Philippe Rey, Histoire du Consulat et du Premier Empire, Paris, Perrin, 2016, 526 p., 25 euros. 

RSN n° 509 : place aux femmes

La Revue du Souvenir napoléonien vient de faire paraître son dernier numéro, le numéro 509, pour la période octobre à décembre 2016.

Ce nouvel opus de la revue commence par un article consacré aux épouses des maréchaux d'Empire par Alain Pigeard, spécialiste de l'armée napoléonienne et président du Souvenir napoléonien. Alessandro Guadagni s'intéresse au marbre blanc de Carrare à l'époque de Napoléon. Gildard Guillaume, administrateur de l'Institut Napoléon, étudie le rapport qu'entretient la ville de Saumur avec Napoléon. Emmanuelle Papot-Chanteranne présente l'exposition que le musée d'Orsay consacre jusqu'au 15 janvier aux fastes du Second Empire. Jacques Macé s'intéresse aux enfants du siècle du Premier Empire à la Première Internationale. Alain Pigeard présente trois figures de napoléoniens : Philippe Séguin, Georges Six et le baron Jean Thiry. Les chroniques portent sur la marque Ville impériale (réseau de villes qui veulent mettre en avant leur héritage napoléonien), la commémoration de la bataille de la Somme, une exposition présentant des costumes du Premier Empire à Dinard, la plaque commémorative rendant hommage au capitaine Prot et l'inauguration du musée dédié à la campagne de 1814 se trouvant à Montmirail. Le programme du colloque "Napoléon et le droit", qui se déroulera les 14, 15 et 16 mars 2017 à l'Institut catholique d'Études supérieures de la Roche-sur-Yon, est présenté. La revue se termine par l'exposé des activités nationales de l'association.

Pour se procurer la revue : http://www.souvenirnapoleonien.org/


vendredi 30 décembre 2016

La bataille des nations disséquée

Bruno Colson est professeur à l'université de Namur et spécialiste d'histoire militaire. Couronné en 2013 par l'attribution du Prix Premier Empire de la Fondation Napoléon, son ouvrage est réédité par Perrin dans la collection « Tempus ». Article paru dans la Revue du Souvenir napoléonien n° 509, octobre-décembre 2016, p. 59. 
La bataille des Nations se déroula à Leipzig du 16 au 19 octobre 1813 : sa durée, ses effectifs (500 000 combattants engagés) et son étendue (environ 15 km²) en font la plus gigantesque des batailles napoléoniennes. Pour la première fois, le nouvel Alexandre est vaincu sur un champ de bataille, ce qui lui fait perdre l'Allemagne, mettant ainsi fin au Grand Empire. La mémoire de la bataille fut longtemps vivace à tel point que l'Allemagne wilhelmienne inaugura en 1913 un monument imposant, le Völkerschlachtdenkmal (Monument de la Bataille des Nations).
En dix chapitres, Bruno Colson raconte minutieusement la bataille, n'hésitant pas à mettre en annexes les ordres de bataille présentant dans le détail les effectifs des armées et le nom des commandants de chaque division. L'auteur remet en cause le fait que cette bataille soit considérée comme une bataille totale (dans la mesure où la violence fut contrôlée par la volonté politique des dirigeants qui préférèrent, pour prendre Leipzig, sacrifier des soldats en lançant des assauts d'infanterie au lieu de la bombarder, ce qui aurait causer des pertes parmi les civils) et doute qu'il s'agit du point culminant de la guerre de libération de l'Allemagne (puisque les civils firent plus attention aux comportements des soldats qu'à leur nationalité). Quelques cartes sont présentes pour représenter les mouvements de troupes.

Bruno Colson, Leipzig, Paris, Perrin, coll. "Tempus", 2016, 672 p., 12 euros. 

L'aîné méconnu des Bonaparte

Dans son nouvel ouvrage, Thierry Lentz nous offre la biographie d'un personnage passionnant ayant eu une vie bien remplie : Joseph Bonaparte (1768-1844), le frère aîné de Napoléon. À la différence de son cadet, peu d'historiens ont voulu lui consacrer une biographie. Article paru dans la Revue du Souvenir napoléonien, n°508, juillet-septembre 2016, p. 70. 


Depuis Gabriel Girod de l'Ain en 1970, Joseph n'avait pas bénéficier du récent renouvellement biographique. Ce manque d'intérêt pour le personnage s'explique par le fait que Napoléon s'attacha à ternir la réputation de son aîné pour taire ses errements notamment en Espagne. 
Thierry Lentz consacre plus de 700 pages à une vie parfois méconnue et déformée par la légende noire. En quatre parties (le chef du clan ; dans le sillage de Napoléon ; deux fois roi ; le gentleman de Point Breeze) et cinquante-quatre chapitres, il nous retrace un parcours qui conduit son personnage de Corte où il naquit en 1768 à Florence où il mourut en 1844.
Joseph parvint par lui-même à obtenir de bonnes positions. Au début de la Révolution, il eut quelques responsabilités en Corse. Son alliance avec la famille Clary en épousant Julie lui permit d'entrer dans le monde des affaires où il excella. Il fut un bon diplomate sous le Directoire (Naples et Rome) et sous le Consulat (Mortefontaine, paix de Lunéville, Concordat et paix d'Amiens). À la différence de Napoléon, il était perçu comme un homme modéré et aimant la paix, ce qui en faisait un recours probable en cas de disparition de son frère. Il refusa de devenir président de la République italienne puis roi d'Italie. Les règnes napolitain (1806-1808) et espagnol (1808-1813) sont réhabilités. Pendant l'exil de l’île d'Elbe, il séjourna en Suisse et, après les Cent-Jours, il s'installa pendant une vingtaine d'années aux États-Unis. Après l'Angleterre, il s'installa en Toscane où il put retrouver son épouse après 27 ans de séparation.En 1862, Napoléon III décida de rendre hommage à un oncle avec lequel il s'était brouillé lors de ses tentatives de Strasbourg et Boulogne en transférant ses cendres aux Invalides auprès de Napoléon et de Jérôme. 
L'ouvrage comporte notes, annexes (chronologie, descendance ...) et bibliographie. Enfin, un cahier d'illustrations réunit quelques portraits et tableaux.

Thierry Lentz, Joseph Bonaparte, Paris, Perrin, 2016, 752 p., 27 euros.  

La France au temps de Napoléon


À l'occasion de son nouveau partenariat avec les éditions Vendémiaire et dans la collection « Bibliothèque du XIXe siècle », Thierry Lentz, directeur de la Fondation Napoléon, propose un bel ouvrage intitulé Napoléon et la France. Article paru dans la Revue du Souvenir napoléonien, n° 505, octobre-décembre 2015, p. 58. 


Depuis sa monumentale Nouvelle histoire du Premier Empire (4 vol., Fayard, 2002-2010), l'auteur a complété sa vision de la période par des études particulières et des interventions dans des colloques. L'ouvrage regroupe une partie d'entre elles et est tourné vers la politique intérieur, formant ainsi le pendant au Napoléon diplomate (CNRS Éditions, 2012) traitant de la politique extérieure. Dans son nouveau livre, l'auteur dresse le portrait du régime napoléonien en trois parties (découpées en douze chapitres) : la première partie sur l'État napoléonien composé de quatre chapitres (« Le gouvernement est au centre des sociétés comme le soleil » ; « Pourquoi pas un Empire ? » ; « La question posée aux Chambres » ; « Légitimités impériales »), la deuxième partie sur la société napoléonienne comptant cinq chapitres (« Le grand ouvrage de la centralisation » ; « L'ordre par le droit » ; « La question économique » ; « La refonte du système judiciaire » ; « Du bon usage des Beaux-Arts ») et enfin la troisième partie renferme les avis de l'auteur sur quelques débats et polémiques (« Une dictature militaire? »; « Napoléon et Hitler » ; « Napoléon et les juifs : assimilation ou infamie ? »). La comparaison entre Napoléon et Hitler est celle que l'auteur avait déjà soumise à nos lecteurs en 2012 (RSN, n° 492, p. 18-25). En fin d'ouvrage, Thierry Lentz propose une petite bibliographie regroupant une quinzaine d'ouvrages récents portant sur la politique intérieure de Napoléon. 

Thierry Lentz, Napoléon et la France, Paris, Vendémiaire Éditions, coll. "Bibliothèque du XIXe siècle", 2015, 256 p., 20 euros. 

Le Sphinx du Concert européen

Yves Bruley, après une thèse de doctorat (prix Prosper Mérimée 2011) et Le Quai d'Orsay impérial (prix de la Fondation Napoléon), consacre un nouvel ouvrage sur La diplomatie du Sphinx. Napoléon III et sa politique internationale. Article paru dans la Revue du Souvenir napoléonien, n° 504, juillet-septembre 2015, p. 64. 


L'auteur décortique la politique étrangère en trois parties. La première porte sur "le temps de la reconquête" : le coup d'État est présenté comme un Austerlitz diplomatique du prince-président. Une fois l'Empire rétabli, Napoléon III réussit son mariage mais les négociations pour que le pape le sacre échouent. L'auteur décrit l'entourage de l'Empereur avant de s'intéresser à la querelle des Lieux saints qui entraîne la France dans la guerre de Crimée. Le congrès de Paris est considéré comme une revanche du congrès de Vienne et marque le début de la prédominance française sur l'Europe. Yves Bruley consacre un chapitre à l'ambassade en Russie de Morny. La deuxième partie s'intitule "le temps de la puissance". Un chapitre porte sur la part prise par Napoléon III dans la fondation de la Roumanie. Ensuite, trois chapitres s'intéressent à la politique italienne de l'Empereur avant des contrées plus exotiques (intervention au Liban et ouverture du Siam à l'influence française). Enfin, la dernière partie, "le temps de l'incertitude", montre les hésitations et faiblesses : conquête du Mexique, question polonaise, unité allemande. La partie se conclut sur deux interrogations : Eugène influençait-elle la politique de son époux ? ; et la politique des Tuileries allait-elle à l'encontre de celle du Quai d'Orsay? En appendice, Yves Bruley livre un récit inédit de la crise de juillet 1870 vue par Hippolyte Desprez dont les Souvenirs du ministère des Affaires étrangères sont une source précieuse. L'historien souligne que la diplomatie de Napoléon III n'est pas un bloc tant sur le fond (la politique des nationalités n'est pas le seul axe de la politique impériale) que sur la forme (le Second Empire est divisé en trois phases : collaboration étroite entre Napoléon III et son ministre des Affaires étrangères, un empereur menant une diplomatie personnelle pouvant aller à l'encontre de la diplomatie officielle réalisée par le Quai d'Orsay, et la fin du règne durant laquelle Rouher voulut influencer la politique étrangère). 

Yves Bruley, La diplomatie du Sphinx. Napoléon III et sa politique internationale, Paris, CLD Éditioins/Fondation Napoléon, 2015, 360 p., 23 euros.